Depuis cet été, on assistait en Iran à des manifestations d’étudiants en faveur d’un régime plus libéral, demandant l’accès à la démocratie. Ces manifestations furent sévèrement réprimées par les « gardiens de la révolution ».
À cette occasion, une journaliste Irano-Canadienne, Zahra Kazemi, fut brutalisée par les forces spéciales qui l’arrêtèrent puis l’interrogèrent de façon « musclée ». Elle ne survécut pas à ses blessures (hémorragie cérébrale) après avoir été violemment battue.
Depuis, l’atmosphère au pays des ayatollahs devient irrespirable : soutien au Hezbollah, qu’on a vu récemment s’illustrer dans un chantage particulièrement odieux, course aux armements, défilé militaire où l’on voyait des missiles arborer les inscriptions « Nous écraserons l’Amérique sous nos pieds » et « Israë l doit être rayé de la carte ».
Pour achever de vous rassurer sur les intentions pacifiques des conservateurs iraniens au pouvoir, voici les déclarations du ministre de la défense iranien, datant de ce 25 janvier à l’ISNA, rapportées par l’AFP :
« Notre industrie balistique a passé un tournant, les capacités de défense de la République islamique ont considérablement augmenté », a affirmé M. Chamkhani, tout en insistant sur l’indépendance et les progrès de l’industrie militaire nationale (on a déjà eu l’occasion de la mesurer en janvier 2002 avec l’arraisonnement de 50 tonnes d’armes destinées à l’Autorité palestinienne à bord du « Karine ’A’ »)
« Maintenant que Saddam Hussein a été renversé, la priorité est la »stabilité et la sécurité de la région« et le »départ des forces étrangères« .
»Nous avons des îles dispersées dans le Golfe, nous aurons ainsi de pleines capacités de défense dans la région", a déclaré le ministre. L’Iran partage en effet avec le sultanat d’Oman les rives du détroit stratégique d’Ormuz et celles du Golfe avec les monarchies arabes et l’Irak.
Et si ça ne suffisait pas, la radio et la télévision iraniennes précisent que : « Le missile Raad [’tonnerre’ NDLR] peut être tiré depuis la côte ou d’un croiseur ou d’un destroyer en mouvement ». Charmant. Vous imaginez si en 1944, les Allemands avaient eu des rampes de lancement mobiles pour leurs missiles V2 ?
Quant à la démocratie : oubliée ! Les tenants du strict régime islamique ne sont pas prêts d’accorder la moindre concession aux « réformateurs ». Ces derniers passeraient d’ailleurs eux-mêmes aisément pour des extrémistes dans nos contrées : après avoir rappelé leur fidélité aux valeurs de la révolution, ils ont accusé les conservateurs de vouloir « ruiner la république » et « d’instaurer un islam comparable à celui des talibans ». Tout un programme…
Résultat : plus d’un tiers des parlementaires iraniens ont présenté leur démission hier. Motif : « Nous ne pouvons pas continuer à siéger dans un parlement incapable de défendre le droit du peuple et d’empêcher la tenue d’élections où le peuple ne peut pas choisir librement ses représentants ».
De « République islamique », il ne reste plus qu’« islamique »â€¦ Les conservateurs ont en effet empêché 87 députés de se présenter aux élections législatives prévues dans 18 jours, pour « manquements à l’islam et à la constitution. (Sic) »
La décision de boycott de la part des opposants peut paraître courageuse, mais en fait elle laisse le champ libre aux conservateurs islamistes. Ces derniers ont, depuis des années, considérablement affaibli l’opposition par une répression implacable, en arrêtant ou en emprisonnant les intellectuels, les étudiants et les femmes.
Une grande manifestation de protestation est prévue mercredi, mais l’autorisation a dores et déjà été refusée.
Nous verrons si pour « garder la révolution », les « Pasdaran » choisiront d’écraser les aspirations à la démocratie du peuple iranien sous le poids de leurs chaînes.