(...) le Président des Etats-Unis le plus favorable à Israë l depuis la fondation d’Israë l (...)
Ces mêmes gens comprennent aussi très bien le conflit israélo-arabe et les périls auxquels Israël se trouve confrontée. Ils sont très rarement juifs (il y a peu de juifs au Texas), et savent fort peu de choses concernant le judaïsme et le sionisme, mais ils comprennent que la société américaine est fondamentalement judéo-chrétienne. Ils comprennent que les juifs sont leurs frères et les raisons pour lesquelles les Etats-Unis doivent se tenir indéfectiblement aux côtés dIsraël. Tout cela, je dois le dire, constitue pour moi un ensemble de bonnes nouvelles. Ceux qui, en Europe ou en Israël, en raison de telle ou telle rumeur, doutaient de la solidité de lalliance israélo-américaine peuvent s'en trouver rassurés.
Jai aussi suivi attentivement les nouvelles et les débats concernant le Proche-Orient et les attentats islamistes à Londres en lisant la presse et en regardant la télévision américaines. Sans que cela me surprenne, dès lors que je séjourne très souvent aux Etats-Unis depuis presque trente ans, tant les nouvelles que les débats mont semblé équilibrés. Même sur des grands networks tels ABC ou CBS, des journalistes confrontés à un homme politique syrien ou à un dirigeant palestinien nhésitent pas à poser les questions qui dérangent. Et si leur interlocuteur tente de tergiverser, les interviewers exercent leur droit de suite. Même sur ces grands networks, si un débat contradictoire est organisé, il sagit réellement dun débat contradictoire, et un « défenseur de la cause palestinienne » sera confronté à un défenseur dIsraël, qui naura pas à utiliser de périphrases pour défendre Israël.
Tout cela constitue un autre ensemble réconfortant. Je nentends pas dire par là que la population américaine est informée exhaustivement mais je prétends quelle est informée de manière suffisante et équitable. Laction, lécrit et la parole dhommes courageux, tels que David Horowitz, Daniel Pipes ou Norman Podhoretz, demeurent plus que jamais indispensables, mais ces hommes ne sont pas dans une situation de parias ou de dissidents au sein de la société américaine. De plus, il est évident que leurs voix se font entendre jusquà la Maison Blanche. A Washington, où siège George Walker Bush, qui est sans conteste le Président des Etats-Unis le plus favorable à Israël depuis la fondation dIsraël.
Je suis revenu à Paris quelques jours au milieu du mois daoût. Sans que cela ne me surprenne là encore, je me suis retrouvé face à un traitement de linformation très différent, et que je trouve plus que jamais inadapté aux besoins dun pays occidental affirmant respecter la liberté de parole et de la presse. Un mois sétait écoulé depuis les attentats de Londres, et ceux-ci semblaient déjà ne plus relever de lactualité pour la quasi totalité des journalistes français (la fabrication du fromage de chèvre dans le bas Berry est assurément bien plus importante !) : lidée quil puisse y avoir un danger global incarné par lislam radical nest pas évoquée une seule seconde dans quelque média que ce soit. Londres, cest Londres, semble-t-on nous dire, et Paris, cest autre chose. La notion de guerre contre le terrorisme nest pas énoncée, sinon pour ironiser sur ladministration américaine ou sur Tony Blair. Faut-il le dire, le désengagement de Gaza nest traité nulle part (je dis bien nulle part) de manière sérieuse et posée ? Les mots utilisés sont soigneusement sélectionnés : « fanatique », « raciste », « dextrême droite » sont des qualificatifs réservés aux juifs israéliens, le mot « colonies » est systématiquement substitué au mot « implantations » et permet donc de faire des variations sémantiques sur les « colons israéliens » (avec, en arrière-fond, tous les clins dil possibles au passé colonial français refoulé). Les Palestiniens sont systématiquement présentés comme des victimes, et les plus assoiffés de sang, les miliciens et les terroristes du Hamas et du Jihad, sont obstinément définis comme des « activistes ».
Ces mots, soigneusement sélectionnés, je ne les ai jamais ou presque jamais rencontrés de lautre côté de lAtlantique où on semble faire davantage attention au poids et aux conséquences de son vocabulaire. Comme la Ména la dévoilé en en faisant la démonstration sémantique et politique, ces expressions ne sont employées en France ni de manière fortuite ni de manière innocente. Et ceux des amis dIsraël qui chercheraient de vraies raisons de sinquiéter tiennent là un authentique sujet d'appréhension : la France médiatique nest peut-être pas globalement antisémite, mais sa façon dinformer, cest évident pour quiconque vient dun pays où lon est vigilant concernant lantisémitisme, apparaît pour le moins perverse et biaisée, au point quon peut légitimement sinterroger sur les intentions de ceux qui recourent systématiquement à cette perversion et à ces déformations.
« Tout se passe en diverses contrées dEurope comme si on voulait accoutumer les populations à la possibilité dune seconde Shoah », notait Daniel Pipes dans un article voici quelques mois. Tout se passe en tous cas comme sil fallait que les Français détestent Israël et pensent quil sagit dun pays aussi répugnant que lAfrique du Sud au temps de lapartheid. Lindignation de tant de bien pensants après la condamnation dEdgar Morin est sur ce point significative : les dérives dEdgar Morin et de ses acolytes relèvent de la haine ordinaire, normalisée, intégrée, à légard dIsraël. Haine qui règne dans lintelligentsia politico-médiatique de ce pays, quelle dissémine autour delle, sans remords et sans se poser de questions. Si Israël devait compter essentiellement sur la France pour assurer sa survie, Israël disparaîtrait très vite de la carte du monde. Que la France en soit arrivée là, soixante ans après le pétainisme et la collaboration, me semble effroyable et me donne la nausée. Que je ne puisse écrire ce que jécris en ce moment que pour un média israélien ou américain, que jaie des difficultés à publier mes prochains livres en langue française, ne fait que renforcer les raisons de ma nausée.
Certains ont pensé que la visite de Sharon en France marquait un réchauffement des relations entre les deux pays. Il nen est rien : Sharon a su, avec intelligence, utiliser létat de faiblesse politique de Jacques Chirac. Chirac, lui, a accepté, voire souhaité, cette visite qui lui a redonné un semblant dexistence internationale ; lui que la presse américaine appelle ironiquement « dead man walking », lhomme mort qui marche encore [1]. Mais rien na changé dans le fond de la détestation française à lencontre dIsraël, je le dis parce que je le constate. Et rien ne changera dans le proche avenir. La haine, en France, est trop
installée.
Jai aussi eu à déplorer le geste sanglant dun jeune israélien. Un individu immédiatement qualifié de « terroriste » et de « raciste » en France, et jai vu les reportages abonder soudainement. Un juif israélien tue quatre arabes israéliens, cest un « terroriste » et un « raciste », certes. Mais mille arabes palestiniens fanatisés tuant des centaines de civils juifs israéliens, ce sont des « activistes », seulement des activistes, vous assurent les médias français. Tirez-en les conclusions que vous voulez ! Pour moi, et pour tous les rédacteurs de la Ména sans exception, un terroriste est un terroriste [2] et jen ai personnellement assez du « deux poids deux mesures » et du détournement de linformation à la française.
Je retourne au Texas, là où, vous diraient tant de journalistes français, on ne sait rien et on ne comprend rien, mais où on sait encore et au moins distinguer le bien du mal. Je ny rencontrerai pas de traces de lintelligence à la française, mais quelques jours supplémentaires de cette intelligence si particulière me semblent, pour lheure, totalement insupportables.
Notes :
[1] "Dead man walking" est lexpression usuelle utilisée par les personnels des pénitenciers américains pour annoncer un condamné à mort en marche vers son supplice.
[2] Note et axiome de la rédaction : Il ny a que les actes des individus qui définissent leur état et lesdits actes, sans quaucune considération concernant leur cause, leur race, leur religion ou leur nationalité ne doive être retenue lors de leur qualification. Toute autre forme de considération de la part dun media tient du racisme élémentaire et non de linformation. Toute théorisation visant à proscrire systématiquement lemploi des termes terroriste et terrorisme pour qualifier les actes terroristes lorsquils sont perpétrés par les membres dune cause, dune race, dune religion ou dune nationalité contre les membres dune autre cause, race, religion ou nationalité, relève de principes racistes en tous points assimilables aux thèses goebbelsiennes.