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La Turquie dans l’Europe ? Non merci...
Jacques van Zand
Article mis en ligne le 9 juin 2010

J’ai longtemps adhéré àl’idée d’une Europe qui intègrerait la Turquie. Ce pays aux multiples facettes et ressources, dynamique et moderne, doté d’une constitution laïque fondée en 1923 par Mustapha Kemal Ataturk aurait pu être l’ultime frontière de l’Europe, jouxtant la Géorgie, l’Arménie, l’Iran, l’Irak, la Syrie.

La Turquie a toujours été, depuis Atatürk, un pays pratiquant un islam modéré, et àma connaissance, le seul pays où 25% de la population, soit 20 millions d’habitants, sont de confession Alevie. L’Alévisme est un autre islam, assez proche du chiisme et beaucoup plus libéral ; jugez-en plutôt : les Alévis prient en dehors des mosquées, une fois par semaine (au lieu de cinq fois par jour), la mixité durant les offices religieux est une règle, les chants, les danses et l’alcool sont tolérés ; le ramadan et le pélérinage àla Mecque qui sont pourtant deux piliers de l’islam ne sont pas obligatoires.

Contrairement aux sunnites qui lisent le Coran en arabe, les Alévis le lisent en turc. Quant àleur prophète il se nomme Ali, cousin et gendre de Mahomet. Pour les Alévis ce qui prime avant toute chose c’est la laïcité.

Ils ont toujours été les plus fervents défenseurs de Kemal Ataturk qui avait mis fin aux persécutions dont ils étaient l’objet. Au printemps 2007 des dizaines de milliers d’Alévis sont descendus dans la rue pour crier « oui » àla laïcité et « non » àl’islamisation du pouvoir.

La presse nationale ne s’y est pas trompée en posant la bonne question :« L’Alévisme est-il le dernier rempart contre l’islamisme » ? I l y a quelques années le quotidien turc « Cumhuriyet » (La République) avait déjàexpliqué que deux camps s’opposent dans le pays. D’un côté un front qui réunit l’ensemble des partis kémalistes, unis par la défense des valeurs laïques ; de l’autre, l’AKP (parti de la Justice et du Développement) formation islamiste modérée qui a remporté les élections municipales de 2004 et les présidentielles de 2007.

La Turquie est divisée entre trois revendications identitaires fortes : kurde, islamiste et alévie. Pourtant même si l’Alévisme est encore peu connu il s’implante de plus en plus dans les grandes villes.

Le réveil identitaire de la communauté Alévie est chaque année plus important ; il a joué et jouera encore un rôle déterminant lors des élections.

Une Turquie virant trop vers l’islamisme verra un jour ou l’autre les Alévis s’y opposer et les islamistes réagir avec violence. Et la paix, dont la laïcité était la garante, risque bien ce jour-làde s’en aller pour longtemps.

Actuellement nous voyons la Turquie prendre ce dangereux virage vers l’islamisme et donc vers le chaos.

Son rêve de jouer un rôle plus important sur la scène internationale et la manière dont elle aborde cette ambition (notamment en s’investissant partialement dans le conflit israelo-palestinien), son rapprochement avec des partis tels que l’IHH, ses sympathies pour des dictatures religieuses telles que l’Iran et ses propositions douteuses relatives àl’enrichissement de l’uranium (personne n’a été dupe, il s’agit simplement d’aider l’Iran àencore gagner du temps pour la fabrication de sa bombe). son attitude toujours plus hostile envers les israéliens et les juifs, tout cela prouve bien que l’islamisme radical infiltre le pouvoir chaque jour davantage

Dès lors, je ne suis plus convaincu par l’idée d’une Europe qui engloberait la Turquie. L’islamisme serait le boulet qui ferait tomber l’Europe, avec de possibles réveils dans les balkans et de possibles récupérations dans les communautés musulmanes (qui se chiffrent en millions d’individus) éparpillées dans les grandes villes européennes.

Non décidément, l’insistance américaine àvoir la Turquie faire partie de l’Europe me plaît de moins en moins. Surtout depuis une semaine.