On peut se demander si le journal Le Monde ne joue pas, toujours, épisodiquement, le rôle de journal officieux du Quai d’Orsay (on se souvient qu’à la fin de l’année dernière Bernard Kouchner voulait se rendre dans la Bande de Gaza pour y procéder à l’inauguration d’un hôpital). Nous en voulons pour preuve l’éditorial du numéro daté du 23 février, qui, sous le titre « Israë l-Palestine  », après avoir évoqué l’amélioration de la situation en Cisjordanie, sur le plan économique et sur celui de la sécurité, déplore la situation de la bande de Gaza.
« Contrôlée par l’autre grand mouvement palestinien, les islamistes du Hamas, elle vit, survit, sous un blocus israélien mais aussi égyptien  » (souligné par nous).
Et de conclure son analyse par une condamnation « tous azimuts  » : « La stratégie de M. Abbas, celle d’Israë l, des Etats-Unis, de l’Union européenne est d’isoler le Hamas, de l’épuiser par embargo interposé. C’est une erreur. Le Hamas fait partie de la réalité palestinienne. Il ne va pas disparaître. Il faut parler avec lui. Comme l’administration Obama a décidé de le faire avec la Syrie, il faut inclure, impliquer, « mouiller » dans la négociation tous ceux qui, s’ils restent exclus du processus de paix, n’auront de cesse de le torpiller  ».
Seulement voilà , si le Hamas est, effectivement, à l’heure actuelle « exclu du processus de paix  » c’est bien parce qu’il est idéologiquement opposé à la paix.
Car, on ne répétera jamais assez qu’on ne peut discuter avec un mouvement qui, « consent  » à accepter, au mieux, une « longue trêve  » (houdna), mais dont l’objectif proclamé est, à terme, la destruction de l’Etat d’Israë l.
Certes, à l’heure actuelle, Israë l cherche à obtenir la libération de Guilad Shalit et pour cela, à l’image du dicton selon lequel « quand on dîne avec le diable, il faut avoir une longue cuillère  », il négocie, pour atteindre cet objectif précis et limité, par l’intermédiaire de l’Egypte et d’un émissaire allemand.
Mais, il est évident, et on ne le répétera jamais assez que l’on ne peut pas négocier, sur un plan général, et à long terme, avec des gens qui n’ont pour idéal que de vous voir disparaître.
Car à la différence d’un armistice, par définition, en principe temporaire, la paix a vocation à durer (les traités de paix sont les seuls accords internationaux qui, par essence, ne peuvent être conclus pour une durée limitée).
Le cas de l’armistice coréen, datant de 1953, est l’exception qui confirme la règle.
La même constatation s’impose au regard des accords d’armistice de 1949, signés par Israë l avec ses voisins.
La preuve en est que depuis – et heureusement – la paix a été signée avec l’Egypte (1079) et avec la Jordanie (1994) et il aurait dà » en être de même avec le Liban, en 1983, si la Syrie n’avait pas été en mesure à l’époque de faire pression sur son voisin pour l’en empêcher.
Et même la Syrie, encore récalcitrante, n’a jamais, à la différence du Hamas, que pourtant elle soutient, officiellement prôné la destruction de l’Etat d’Israë l.
Encore que les préparatifs de 1967 et la guerre de Kippour en disent long sur les intentions syriennes à certains moments, mais il en était de même, dans les mêmes circonstances, pour l’Egypte et, pourtant, - heureusement – par la suite ce pays a conclu un traité de paix.
De fait, il appartient au camp arabe, s’il veut réellement la paix d’exercer les moyens de pression dont il dispose pour amener le Hamas à se réconcilier avec le Fatah, car il est évident que si l‘établissement de la paix ne peut se faire que progressivement, on ne peut imaginer, à la longue, un statut différent pour la Cisjordanie et pour la Bande de Gaza.
Or, il est évident que le Hamas ne subsiste que grâce à l’appui de certains Etats arabes, de la Syrie en particulier.
Et même, dans une certaine mesure, l’Egypte en tolérant la contrebande d’armes au profit du Hamas, à partir de son territoire, apporte, jusqu’à présent, un soutien logistique à ce mouvement terroriste.
Il y a, cependant, sur un point, où nous partagerions volontiers l’analyse des éditorialistes du Monde , c’est en ce qui concerne l’heureuse initiative prise par les Etats-Unis d’établir de nouveaux rapports avec la Syrie.
C’est peut-être un moyen d’arriver à amener Bachar al Assad à ne plus soutenir son encombrant allié.
Cela nous paraîtrait plus raisonnable que d’imaginer d’inviter à des négociations de paix des gens, dont le rêve est ce voir disparaître leurs voisins.