Observer successivement le journal télévisé sur les trois chaînes israéliennes et sur France 2 est plein d’enseignements et ... d’épreuve morale. Sur France 2, c’est le discours du gouvernement qui est promu dans un monde de bisounours où tout ira bien, où le chomage sera en régression, où les meurtriers sont des forcenés et des déséquilibrés qu’on va interner, où il y a le méchant FN et le bon républicain, où l’islam est absolument pacifique...
Sur les chaînes israéliennes, ce ne sont qu’affaires de mÅ“urs, de harcèlement sexuel imputé à des personnalités politiques (une véritable épidémie ces jours-ci), de prévarication de fonctionnaires et de personnages de la vie publique, d’incarcération d’un ex-premier ministre, le tout interrompu par des publicités coup-de-poing et des annonces de Télé-réalité.
Ce qui frappe surtout, par contre, ces jours-ci, dans un pays objectivement en guerre, c’est la mise en accusation permanente de l’Etat, et notamment de la coalition au pouvoir et de son leader. La violence à leur égard est brutale. Il faut dire qu’elle est d’abord le fait du chef de l’opposition, Herzog, qui manie à la tribune de la Knesset les accusations d’incompétence, de racisme et de tyrannie envers le premier ministre. La Liste arabe unifiée lui emboîte le pas avec une violence verbale inouie et un rejet de la légitimité de l’Etat qui, en France, l’aurait mise au ban de la société. Le meurtre de Rabin est sans cesse instrumentalisé par la gauche pour accuser la droite israélienne de préparer de futurs meurtres et l’attentat commis par des militants de l’apocalypse imputé à tout le sionisme religieux. Débats à la knesset et sur les plateaux sont ainsi des foires d’empoigne dont il ne nous parvient que des hurlements.
Dans tout ce brouhaha, je retire cependant, un trait marquant : les journalistes israéliens instruisent un procès permanent de racisme contre leur propre peuple, le petit peuple, celui qui est confronté quotidiennement à la crainte du couteau de cuisine de son voisin arabe et qui a le sentiment, qu’outre la compassion pour les victimes, il est abandonné par ses élites et son gouvernement. Le discours journalistique reste, par contre, remarquablement silencieux et très sobre sur les turpitudes palestiniennes, sur une société qui a éduqué plusieurs générations au meurtre, comme le révèlent chaque jour sa télévision et son discours publics sans compter les livres de ses écoles. Il reste très sobre sur l’hostilité religieuse et ethnique de tout un secteur de la société arabe israélienne, islamistes et nationalistes siègeant à la Knesset même mais récusant la légitimité de l’Etat, du drapeau, de l’hymne national. Là , point de scandale ni de reportages sensationnels qui replacerait dans le juste contexte la défiance du public juif.
Mais la critique de soi est unilatérale, la plainte est le privilège des Arabes israéliens ou palestiniens (ce qui dans leur dire est la même chose). L’accusation de racisme lancée aux Juifs est une ritournelle, des journalistes mais aussi d’Arabes israéliens qui appartiennent pourtant aux populations les mieux loties aujourd’hui d’un monde arabe à feu et à sang !
Il est triste de constater que le politiquement correct israélien est du même acabit que celui de l’Europe. Sortant de sa fonction de communication des nouvelles, le journaliste est devenu un imprécateur public dont on se demande d’où il tire sa légitimité et sa légalité démocratiques.
Les temps de la Pravda communiste sont de retour. Vous vous souvenez ? Ce journal qui s’appelait « La vérité » et qui assénait un mensonge officiel ? Au moins dans l’Union soviétique, il était sous la gouverne de l’Etat. Aujourd’hui c’est un pouvoir décérébré. Dans le cas d’Israë l ce n’est pas comme celà qu’on gagne la guerre, à la fois sur le plan externe et sur le plan interne. On la perd plutôt !
*Tribune sur Radio j, le 8 janvier 2016.