Par David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international
lundi 13 novembre 2006
Guysen.Israë l.News a cru pouvoir résumer sous le titre : « La France proche d’Israë l  », l’intervention, samedi soir, de Dominique de Villepin devant l’exécutif du Congrès juif mondial, réuni à Paris.
Le Premier ministre aurait déclaré que « la France soutenait la solution de deux Etats vivant côte à côte en paix, mais qu’elle ne transigerait pas sur la sécurité d’Israë l  ».
On s’étonnera que personne n’ait songé à lui demander, alors - mais il est vrai que cela eut été « politiquement incorrect  » pour quelle raison, au même moment où il prononçait cette « déclaration d’amour  », la France condamnait Israë l aux Nations Unies.
En effet, sur instruction du gouvernement, présidé par Dominique de Villepin, le représentant permanent de la France au Conseil de sécurité rejoignait les représentants de la Chine et de la Russie, membres permanents dudit Conseil pour voter avec l’Argentine, le Congo, le Ghana, la Grèce, le Pérou, le Qatar et la Tanzanie, membres non permanents, un texte qui condamnait Israë l, sans faire la moindre allusion à l’origine de cette regrettable « bavure  » de Beit Hanoun, à savoir le lancement de Qassam sur le territoire israélien.
Plus honnêtement, mais peut-être pas très courageusement, le Danemark, la Grande-Bretagne, le Japon et la Slovaquie se sont abstenus.
Et, s’il n’y avait pas eu le veto des Etats-Unis, la résolution, ayant atteint la majorité requise de 10 voix, était adoptée et, une fois encore, la victime était condamnée et ses agresseurs absous.
Il est vrai que le texte résultant d’une initiative du Qatar, il y avait fort peu de chance pour qu’on se préoccupe également de la protection de la population civile israélienne.
Ce n’est certes pas la première fois que la France pratique ainsi le « double langage , telle la chauve-souris : « je suis oiseau, voyez mes ailes ; je suis souris et vivent les rats  »...
Il ne se passe pas de jours, d’ailleurs, que lors de ses points de presse, le porte-parole du Quai d’Orsay ne fustige les initiatives israéliennes, qu’il s’agisse des mesures prises, au sud, pour faire cesser les tirs de Qassam ou, au nord, pour surveiller les mouvements transfrontières, en provenance de la Syrie, afin de faire cesser la contrebande d’armes au profit du Hezbollah.
Le gouvernement français en arrive même à inventer des incidents (v. notre analyse du 9 novembre dernier).
Jusqu’à présent aucune confirmation d’un éventuel incident n’est venue ni du côté israélien, ni même du côté de la FINUL.
Rien de tel que de crier « Au feu !  » afin de se faire prendre au sérieux.
Nous en voulons pour preuve, l’impudence de l’Iran dont le représentant permanent aux Nations Unies vient de s’adresser à Kofi Annan et au Conseil de sécurité pour obtenir une condamnation d’Israë l.
Et pourquoi cela ?
Parce que le gouvernement iranien a été choqué des propos d’Ephraïm Sneh, vice-ministre de la défense israélien, qui avait affirmé vendredi qu’Israë l devait ’’repousser à tout prix la course à l’armement nucléaire de l’Iran’’.
On s’étonnera d’ailleurs qu’Israë l n’ait pas depuis longtemps, lui, demandé l’exclusion de l’Iran de l’Organisation mondiale.
En effet, c’est la première fois, à notre connaissance, que, depuis la création de l’ONU, en 1945, un Etat membre - l’Iran - appelle - à la destruction d’un autre Etat membre - Israë l - ce qui est manifestement contraire à la lettre et à l’esprit de la Charte des Nations Unies.
D’ailleurs devant l’absence de réaction, les dirigeants iraniens répètent à l’envi cette invective.
Certes, Israë l, parfaitement conscient du danger que représentent les projets d’armement nucléaire de l’Iran ne veut pas donner l’impression qu’il se sent seul menacé, alors que tout l’Occident (voire même certains Etats du Moyen Orient) doit se sentir concerné.
Mais rien n’empêche que l’on dissocie les deux questions : la menace nucléaire et l’appel à l’ « éradication  » d’Israë l.
Plutôt que d’appeler à une mise en accusation des dirigeants devant une juridiction internationale, ce qui n’est pas possible, en l’état actuel du droit international (v. notre point de vue du 7 novembre dernier), un mouvement d’opinion devrait se dessiner en Israë l pour demander l’engagement d’une procédure d’exclusion de l’Iran, procédure qui est - théoriquement du moins - parfaitement concevable.
D’ailleurs, le gouvernement israélien a-t-il besoin d’un mouvement d’opinion pour prendre une telle initiative ?
Sans toute craint-il que certains de ses « amis  » (nous ne citons personne....) n’hésitent à s’associer à une telle initiative de peur de perdre certains marchés.....
En tout état de cause, il y a, au moins, une constatation, qui se dégage du dernier vote aux Nations -Unies : l’inexistence de l’Union européenne, du point de vue politique.
La France et la Grèce se sont « distinguées  », par rapport à la Grande-Bretagne, au Danemark et à la Slovaquie.