Des démêlés conjugaux d’un membre de la Délégation générale de Palestine en France ont amené, récemment, un tribunal français à se pencher sur le statut de cette Délégation.
L’intéressé, de nationalité jordanienne, invoquait l’immunité diplomatique, dont il prétendait jouir en tant que membre de cette Délégation, c’est à dire qu’il contestait à son épouse le droit de le poursuivre devant les tribunaux français, dans le cadre d’une procédure de divorce.
Finalement, la Cour d’appel de Paris s’est déclarée incompétente, non pas sur la base de cette immunité, mais parce qu’elle a estimé que le litige ne se rattachait pas à l’ordre juridique français, condition fondamentale pour qu’une juridiction française puisse en connaître.
Car, la Cour s’est fondée sur un courrier du Garde des Sceaux d’après lequel « selon les informations….communiquées par le Ministère des Affaires étrangère (l’intéressé) n’est pas diplomate accrédité en France  ».
Bien que cette formulation soit inexacte, car un membre d’une mission diplomatique, n’est pas « accrédité  », seul le chef de la mission l’étant, on relèvera simplement, que l’intéressé ne figurait pas sur la liste officielle du corps diplomatique.
Nous profiterons de ce fait divers judiciaire pour présenter brièvement la situation juridique de la Délégation générale de Palestine en France.
Certes, à différentes reprises, Yasser Arafat, avant même son élection à la présidence de l’Autorité palestinienne s’est vu reconnaître, sur la base de la courtoisie, un statut de chef d’Etat et ce jusqu’au lendemain de sa mort.
A cet égard les palinodies des plus hautes autorités de l’Etat français sont là pour en témoigner.
Mais, à aucun moment, la France n’a reconnu l’existence d’un « Etat palestinien  ».
Comme l’indiquait un point de presse du porte-parole du Quai d’Orsay, le 4 juillet 2000, la France s’est alignée sur la position de l’Union européenne qui, dans une déclaration de Berlin de mars 1999, s’est déclarée disposée à envisager cette reconnaissance, « le moment venu  ».
Mais, il n’en demeure pas moins qu’en octobre 1975, se fondant à l’époque sur le fait que l’O.L.P. disposait, depuis l’année précédente, d’un statut d’observateur permanent aux Nations Unies, le gouvernement français a autorisé l’ouverture à Paris d’un « bureau d’information et de liaison  » de cette organisation.
En 1988, après la décision prise par le Conseil national palestinien, réuni à Alger, de proclamer « l’Etat de Palestine  », le gouvernement français a autorisé ce bureau d’information et de liaison à s’appeler « délégation générale de Palestine  », son responsable étant lui-même présenté comme « délégué général de Palestine  ».
Le premier titulaire de ce poste fut Ibrahim Souss, auquel Succéda Leïla Shahid, petite-fille du grand Mufti de Jérusalem, de sinistre mémoire.
Toutefois, la France n’a toujours pas reconnu cet Etat (non sans une certaine naïveté, eu égard aux actions terroristes que l’OLP a continué à initier, le gouvernement a justifié, à l’époque, l’octroi de cette nouvelle appellation par la constatation que les décisions prises à Alger « constituaient un pas important en direction de la paix  », qui l’incitait à « traduire dans les faits son appréciation positive  »).
Dans ces conditions, le gouvernement français, à l’instar de la situation de la Délégation générale de Corée du Nord (et comme, autrefois, la Délégation générale du Nord Viet-Nam) n’accorde pas le statut diplomatique à la Délégation générale de Palestine.
En revanche, le délégué général est titulaire d’une carte de membre du personnel diplomatique d’une ambassade d’un Etat étranger et bénéficie, à ce titre des privilèges et immunités prévus par la convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques (v. réponse à la question écrite n° 47409, JO, AN, QE 21 octobre 1991 p. 4300).
Il en est de même d’un certain nombre de membres de ces Délégations, mais la France est libre de fixer le nombre de ces bénéficiaires.
En effet, la différence entre cette situation et celle d’une mission diplomatique d’un Etat étranger reconnu c’est qu’elle repose sur un acte unilatéral de l’Etat français qui agit, dans le cadre de la courtoisie internationale, et non, automatiquement, en application de la convention précitée, dont le bénéfice ne pourrait pas être retiré unilatéralement par la France.
Et, dans cette hypothèse, c’est l’Etat étranger qui détermine les membres de la mission, qui bénéficieront des privilèges et immunités diplomatiques.
* David Ruzié, professeur émérite des universités, spécialiste de droit international